Association du patrimoine artistique asbl

LUCIEN STASSEN

PEINTURES

exposition du 19 janvier au 4 février 2018

Association du Patrimoine artistique

7 rue Charles Hanssens à 1000 Bruxelles

jeudi, vendredi, samedi et dimanche de 14 à 18 heures

vernissage jeudi 18 janvier de 6 à 9 heures

Peintures récentes

Les tableaux de Luc Stassen procèdent d'un mouvement qui est une évaluation critique permanente. Avec lui, nous examinons l'effet de telle couleur à côté de telle autre, sur telle étendue. Et si je fais cela? Leur aspect est ouvert, comme non définitif. Ils expriment un processus qui pourrait ne jamais s'arrêter. Le plaisir de voir les tons qu'on juxtapose, et cette mince bande qui les sépare, qui les fait chanter... Ou ces griffures qui leur donnent un aspect volontairement hasardeux... Des grandes plages un peu vibrantes et la matière un peu rugueuse où joue la lumière. Je pense au son dirty de Jimmy Hendrix, à ses accords brouillés, à tout ce qu'il y avait de frais et d'inédit dans la musique des années 70. Même côté expérimental. Le support est comme une sorte de champ d'expérience, limité à lui-même, mais qui met en jeu le sens plastique et le goût, et la recherche de sensations inédites.

Après un début de carrière solitaire dans les années 70 et 80, Luc Stassen s'est consacré à l'enseignement à Sint-Lucas à Bruxelles. Par cette mission à laquelle il s'est pleinement voué, il a enseigné, mais s'est aussi enseigné à lui-même. Modèle vivant, art du dessin, approche de la couleur. Il dessinait à côté de ses étudiants, participait à leurs exercices. Son œuvre actuelle est dans le prolongement de cet élan et nous sommes à ses côtés pour les apprécier et entrer dans ce plaisir d'évaluer... sans qu'il soit nécessaire d'en demander plus à l'art.

Pierre Loze

C’est dans un gros cahier de comptes où seules sont tracées quelques lignes verticales, que Lucien Stassen travaille avec bonheur. Parti de l’idée de faire disparaître les lignes, il charge peu à peu les pages d’aplats noirs, gris qui estompent peu à peu les lignes comptables. Des couleurs viennent se superposer ou se côtoyer. Les horizontalités et les verticalités dominent, des formes courbes apparaissent à leur tour, mais plus rarement, et parfois encore plus exceptionnellement, une silhouette humaine, un visage. Les formes dominantes restent volontairement carrées ou rectangulaires à l’instar de la superbe maison que l’architecte Georges Baines a construite pour Lucien et sa famille, suite à l’incendie qui avait rendu leur ancienne maison inhabitable, complètement brûlée de la cave au grenier où se trouvait son atelier. Tout était noir, couvert d’une suie grasse, rien n’avait pu être récupéré dans la maison. Ni toiles, ni carnets d'études, livres, archives… Rien n’y réchappa, tant la suie était tenace. Aujourd’hui le cahier de Luc vient rappeler cet épisode tragique mais qui donna naissance à cette magnifique demeure faite de parallélépipèdes rectangles ajustés de main de maître. L’escalier menant à l’étage est subtilement planté au centre du bâtiment dans un cube de bois des plus inattendus et en même temps des plus harmonieux. C’est comme si Lucien, habité par les volumes qu’il occupe, ne pouvait plus s’en détacher et lorsqu’il peint sur ces épais panneaux de bois, c’est avec la même rhétorique, ne s’intéressant qu’à la première et la deuxième dimension, laissant à l’architecte la troisième dimension, et se tournant vers le choix des couleurs dont la fraîcheur vient attiser notre curiosité lorsqu’elles se côtoient ou se marient.

Dominique Vautier

LUCIEN STASSEN

Lucien n’aime pas parler de son œuvre ou de sa création. Il préfère dire “mon travail”, “ma recherche” et en parler plutôt en termes d’expérience. Et c’est bien de cela dont il s’agit.

Dessiner ce qui existe déjà ne l’intéresse guère, bien qu’il possède le talent pour le faire, il a enseigné le dessin pendant 35 années.

Son travail commence à partir d’un support blanc, sans aucun élément concret comme point de départ, le pinceau, la palette, des gestes précis, des couleurs et ce qu’il ressent apparaît sur le tableau, il est toujours à la recherche de la forme la plus parfaite, des couleurs qui s’harmonisent au gré son humeur. Il aime aussi dire qu’il choisit le hasard.

Sa documentation émane de ses travaux précédents ou de ses recherches graphiques qu’il réalise dans de grands cahiers où il parvient à lâcher prise, à laisser sa créativité s’exprimer sans souci pour la noblesse du support. Peu lui importe de réussir et ce sont des risques qu’il prend que vient son expressivité.

Jamais il n’est vraiment content de ce qu’il réalise, à l’infini il recommence, retrace, redessine, corrige, griffonne, gratte, incline, décline jusqu’à ce qu’il décide enfin d’accepter un résultat final.

Ses peintures tiennent un peu d’un enfantement douloureux. Ses inquiétudes et ses questionnements ne transparaissent cependant pas. Au contraire, il en émane une certaine sérénité, une grande fraîcheur, une vigueur dans le trait.

Il connaît pourtant de longs moments où seul dans le doute le plus complet, avec les inquiétudes des ratés, du gaspillage de temps, de matériel, d’idées avortées, il est là seul dans son atelier face à son chevalet, constamment balancé entre le sentiment de réussite et d’échec.

Le moment le plus agréable est celui où ses toiles sont enfin accrochées sur les murs d’une galerie ou d’un appartement.

Nicole Stassen-Tuyaerts